Pour les vignerons de la vallée de la Loire, les conditions climatiques du week-end de Pentecôte ont été décisives sur la vigne en fleur. Certains ont subi la grêle qui a détruit une partie de la récolte en devenir, tandis que d’autres ont accueilli avec plaisir la pluie qui faisait défaut depuis des mois.
« Il faut avoir les nerfs solides. J’ai failli craquer ce week-end » déclare Benoit Gauthier, vigneron à Vouvray, qui n’a pas oublié le gel du début d’année. « J’avoue que j’ai du mal à encaisser » poursuit celui qui a enchainé les catastrophes climatiques depuis 1982 et 1985. La différence est que maintenant, il n’y a pas de stock pour atténuer les incidences : « La sécheresse en 2020, le gel et la grêle en 2021, on a besoin d’une récolte ! ». Mais il reconnait que l’épisode de pluie et grêle a moins de conséquences que ce qu’on aurait pu penser, il y a quelques hectares touchés – même si ces surfaces peuvent parfois affecter dramatiquement une exploitation dans sa quasi-totalité.
Grêlons entre petits pois et cerises
A côté de 2021, où il était au milieu d’un nuage qui avait tout dévasté, cette année, le système de protection s’est mis en marche et a diminué la taille des grêlons « entre des petits pois et des cerises », alors que les zones urbaines ont eu des balles de tennis. En effet, les vignobles d’Indre & Loire sont relativement protégés depuis 2016 grâce à un système mis en place avec l’ANELFA, Association nationale des études sur la lutte des fléaux atmosphériques, en relation avec les informations de Météo France. Le principe de la lutte contre la grêle consiste à introduire artificiellement dans les nuages des noyaux glaçogènes d’iodure d’argent de façon à augmenter le nombre de cristaux de glace, et à réduire en conséquence la dimension des grêlons : ceux-ci tombent alors plus lentement et fondent en totalité ou en partie avant d’atteindre le sol. Jean-Marc Gillet, du domaine de la Rouletière à Parçay-Meslay pense aussi que « sans le réseau, on aurait deux à trois fois plus de dégâts. J’ai eu quelques feuilles percées, mais la pluie a fait du bien, cela faisait trois mois qu’on avait eu seulement 25 mm. Le chenin est en pleine fleur, ça a relancé la floraison ».
D’Azay-le-Rideau à Montsoreau
La grêle a suivi un couloir qui est passé à Azay-le-Rideau, il a épargné Saint-Nicolas-de-Bourgueil, mais il a largement touché d’autres appellations comme Bourgueil et Chinon. Sur cette dernière, des zones ont pris fort, à Huismes, à Savigny-en-Véron. A Saint-Germain-sur-Vienne, le château du Petit-Thouars a été durement touché. Il se trouve à l’extrémité ouest de l’appellation Chinon, juste en amont de la convergence de la Vienne avec la Loire. Dans cette zone la ville de Fontevraud a souffert et une partie du Saumurois. Là encore tous les domaines ne sont pas affectés. Chez Patrick Rétif, au domaine des Damoiselles de Turquant, la moitié de la propriété a subi la grêle : « On ne sait pas encore les conséquences exactes sur 8 hectares, mais ce qui est sûr, c’est qu’il y en 6 qui ne donneront rien. Certains endroits c’était des billes, mais d’autres de vraies balles de ping-pong. Le lendemain j’ai vu des pigeons et des tourterelles mortes entre les rangs de vigne ». Comme il avait déjà perdu 30% par le gel d’avril et qu’il n’a rentré qu’une récolte normale (2020) depuis 2016, il craint de perdre des marchés. « Même si on a une assurance récolte, ça ne remplace pas les clients » regrette-t-il.
Mathieu Vallée du Château Yvonne à Parnay a du mal à sourire, même s’il n’a eu aucun dégât, quand il constate ce qu’ont subi ses voisins de Montsoreau « des rameaux de l’an dernier parfois complètement fracassés, des vignes qui mettront deux ans à se remettre » regrette-t-il. Il reconnait qu’avoir des vignes disséminées est parfois un avantage.
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