Le domaine de La Bégude de la famille Tari a été vendu à l’homme d’affaires rennais Christian Roulleau. Le nouveau propriétaire du vignoble de Bandol va étendre le vignoble, construire un autre chai et développer une activité œnotouristique.
Le domaine de la Bégude, grande propriété viticole de Bandol (83) passe sous pavillon breton. Ou plus exactement son propriétaire depuis 25 ans, le bordelais Guillaume Tari, l’un des fils de Pierre Tari à la tête du château Giscours jusqu’à la fin des années 90, l’a vendu à Christian Roulleau, millionnaire rennais (fondateur de Samsic, groupe de multi-services aux entreprises). Mais celui-ci est surtout détenteur depuis 2019 du château Dauzac, grand cru classé de Margaux, et depuis 2021 de Maison Montagnac, négociant sur la place de Bordeaux et en vins de Bourgogne (pour 51 % des parts). La rumeur courait depuis déjà plusieurs fois mais cette fois, la signature annoncée par les deux parties est officielle; la vente s’est conclue pour 35 M€. Un recours a toutefois été déposé par la famille rivale des Tari, les Albada Jeigersma, exploitant de Giscours dans la continuité de l’imbroglio juridique qui les oppose depuis près d’un quart de siècle. Un développement œnotouristique annoncé « La famille Tari, Guillaume et sa femme Soledad, se sont particulièrement bien occupé de La Bégude et Guillaume restera à nos côtés pendant trois ans pour transmettre son savoir » a précisé Laurent Fortin, actuel directeur général de Dauzac qui prend également la direction de La Bégude en embauchant un directeur technique Vincent Bouyer et un directeur commercial Robert Oustric. « Nous voulons aller encore plus loin dans l’excellence, faire croître la notoriété du domaine et mettre en place un véritable projet œnotouristique en aménageant des chambres d’hôtes dans les deux bastides, sans doute avec un centre de vinothérapie. Nous allons développer l’organisation des mariages et séminaires en profitant des bassins de population des grandes métropoles comme Aix, Marseille et Toulon qui sont à nos portes » précise Laurent Fortin. Une agroforesterie naturelle Sur les 300 hectares qui arrivent dans le portefeuille Roulleau, une trentaine d’hectares de vignoble réparti en 125 parcelles sont déjà en production. Le nouveau propriétaire ambitionne d’atteindre d’ici 5 ans plus d’une cinquantaine d’ hectares de vignes mais également d’amandiers et d’oliviers. Il sera toujours conduit en bio (le domaine l’est depuis 2003), voire en biodynamie dont il est déjà proche avec un travail de longue date en agroforesterie. « Le domaine, le plus au nord et le plus en altitude de l’appellation, – jusqu’à plus de 400 m, est dans une bulle agronomique avec une agroforesterie naturelle puisque nous sommes arrivés en 1985 sur un territoire abandonné et nous y avons créé des vignes au milieu de la forêt et non l’inverse, raconte Guillaume Tari. Il abrite de nombreuses espèces protégées, notamment l’aigle de Bonelli. Nous avons tenu à préserver la flore endémique qui résiste toujours mieux aux excès, notamment à la sécheresse. Nous sommes ainsi protégés des vents brulants…mais avec beaucoup de chevreuils et de sangliers ». Les nouvelles parcelles seront donc clôturées comme le reste de la propriété qui dispose également d’un conservatoire de mourvèdres. Toujours en rouge majeur La Bégude sera prochainement doté d’un nouveau chai, rien d’ostentatoire à la bordelaise mais plutôt le projet intégré aux bâtiments qui était déjà dans les cartons de la famille Tari mais revu et corrigé pour après la vendange 2023. Le domaine produit environ la moitié de sa production en rouge, 40 % en rosé et 10 % en blancs. Pas de changement d’orientation prévu : « Nous gardons la typologie et maintiendrons ce fort pourcentage de rouges qui fait aussi la particularité du domaine, assure Laurent Fortin. On ne change rien dans la continuité mais nous allons sans doute développer la cuvée Le Cadet de la Bégude ». Elle avait été lancée en 2017 en rouge et rosé en IGP Méditerranée. Christian Roulleau devrait a priori calmer son appétit viticole. « Il ne s’agit pas de collectionner les propriétés, assure Laurent Fortin. Nous avons juste eu l’opportunité de trouver une pépite avec un patrimoine végétal à nul autre pareil et les deux familles partagent la même passion et les mêmes valeurs ». Quant à la famille Tari qui a gardé 200 hectares sur le domaine bandolais, elle s’installe dans une vieille ferme du XVIIIe de l’autre cote de la propriété. « J’ai toujours rêvé d’avoir le temps d’aller déguster ailleurs; ce que je ferai quand la greffe aura pris avec la famille Roulleau ». Lors de ses périgrinations, gageons que Guillaume Tari pourrait s’intéresser à un nouveau projet viticole.
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